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Dr Ayéfouni ALE GONH-GOH, D.G de l’ICAT « Le défi fondamental auquel nous devons faire face est notre système de production»

 

Du 04 au 05 septembre dernier à l’Hôtel Cristal à Kpalimé, a été porté sur les fonts baptismaux, le Forum National de Conseil agricole et Rural (FNCR-Togo) à l’issue d’une assemblée générale constitutive à laquelle ont pris part une cinquante de délégués impliqués dans les questions de développement agricole et rural au Togo. Ce Forum entend servir de cadre d’échanges de tous ces acteurs pour répondre en termes de conseils agricoles aux nombreux défis que rencontre le monde rural .

A cette occasion, Dr Ayéfouni ALE GONH-GOH,  Directeur général de l’Institut de Conseil et d’Appui Technique (ICAT) et Président du Conseil d’Administration d FNCR-Togo s’est confié à manationtogo.com sur les nombreux chantiers qui l’attendent, sa vision à l’horizon 2030 de l’agriculture togolaise… Lecture!

Manationtogo.com : Dites nous, qu’est-ce qui justifie la nécessité de créer un forum national de conseil agricole et rural au Togo ?

Dr Ayéfouni ALE GONH-GOH : La création d’un Forum National de Conseil agricole et Rural au Togo (FNCR-Togo) se justifie, à mon avis, à double titre. D’abord, en ce sens qu’aujourd’hui, les services de conseil agricole et rural sont fournis par des acteurs qui sont pluriels et il est vraiment nécessaire dans notre pays que tous les acteurs du conseil agricole et rural puissent d’abord trouver un cadre d’échanges et de concertation pour non seulement échanger les stratégies et méthodes utilisées pour améliorer les productions agricoles et les interventions auprès de nos producteurs agricoles que nous appuyons. De l’autre côté, cela se justifie du fait que notre pays ne va pas rester en marge, vu que dans un passé récent, les services de conseil agricole et rural ont connu des moments assez difficiles ; maintenant sur le plan mondial, on a constaté que les services de conseil agricole et rural s’organisent dans une certaine dynamique où aujourd’hui, il y a un Forum mondial du conseil agricole et rural qui organise annuellement ses réunions. Il y aussi un Forum africain de conseil agricole et rural et au niveau sous régional, nous avons un réseau de services de conseil agricole et rural qui est également en cours de finalisation. Et donc, toutes ces institutions internationales devraient avoir comme adhérents des fora nationaux. Et il se trouve que le Togo jusqu’à maintenant n’a pas encore un Forum national. Donc c’est ce qui justifie que le Togo puisse s’organiser pour avoir un Forum national de conseil agricole et rural au sein duquel les acteurs vont parler d’une seule voix auprès des institutions internationales.

L’ ICAT dont vous êtes le Directeur général est la structure initiatrice de ce Forum. Pourquoi avoir pris les devants de la chose ?

Je crois qu’il était vraiment nécessaire que l’ICAT prenne les devants du fait que d’abord, ce n’est pas pour se venter, mais il faut dire qu’en matière de conseil agricole et rural au Togo, l’ICAT est l’institution vers laquelle on se retourne immédiatement ; cet institut par excellence du Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche chargé de l’appui conseil aux producteurs. Donc c’est l’institution mandatée par l’Etat. Je crois que l’ICAT a en fait deux casquettes : d’abord c’est un service de conseil agricole et rural aux producteurs, mais il joue aussi le rôle régalien dans ce domaine pour le Gouvernement. C’est donc par rapport à cela que l’ICAT a pris le devant en organisant déjà une réunion de sensibilisation et d’information sur la nécessité pour les services de conseil agricole et rural de pouvoir se retrouver dans un cadre comme celui là.

Ce Forum réunit les acteurs des services de conseil agricole et rural. Qui sont-ils exactement ?

Par définition, nous disons que tous les acteurs qui contribuent à fournir des services et des informations permettant aux producteurs de pouvoir améliorer les activités agricoles et économiques sont des acteurs du conseil agricole et rural. Quand nous prenons cette définition, certes il y a des prestataires de services tels que l’ICAT, les ONG pour l’appui technique aux producteurs, mais il y a aussi les faîtières des organisations des organisations paysannes qui jouent ce rôle à double titre : d’abord bénéficiaire des services mais également fournisseurs des services de conseil à leur membres. Il y a également des institutions de recherches et de formation agricole qui sont également citées comme des fournisseurs de conseils agricole aux producteurs. Il y a aussi les institutions de micro finance qui également participent à ce service. Le service, aujourd’hui, ce n’est pas seulement l’appui conseil ou l’information agricole mais aussi le crédit que les institutions de micro finance offrent aux producteurs. Les médias également sont des acteurs qui fournissent le conseil agricole aux producteurs. Donc en gros, il y a les médias, les institutions de micro finance, les institutions de recherche, les ONG, les professionnels agricoles qui sont les acteurs de conseil agricole et rural au Togo.

Depuis quelques années, le Togo connaît des excédents de produits agricoles mais de nombreux défis se posent encore à notre agriculture. Avec ce Forum qui se met en place, quels seront vos plans d’actions pour relever ces défis ?

Vous l’avez bien identifié, le secteur agricole aujourd’hui a plusieurs défis à relever. Le défi fondamental auquel nous devons faire face est notre système de production. Ce système a besoin d’être réformé. Et ceci à travers un service de conseil agricole et rural performant. J’appelle service de conseil agricole et rural performant, un service qui fournit des informations de qualité nécessaire au producteur pour pouvoir lui permettre de mener ses activités agricoles dans un système assez performant et rentable. Aujourd’hui c’est un peu notre problème ; si nous faisons le conseil aux producteurs qui ne tient pas compte de leurs besoins ou demandes, cela va toujours donner très peu de résultats. Il y a aussi un concept qui doit rentrer dans nos habitudes : c’est le conseil agricole dirigé vers le marché. C’est ça le problème que nous avons aujourd’hui. Il faut que le conseil soit adapté au marché pour que la production puisse être également y être adaptée. Donc aujourd’hui, avant que le producteur ne produise, il faut qu’il se demande où vendre ses produits et quel est le marché dont il dispose. Tout doit partir de là et notre conseil agricole aujourd’hui doit s’adapter à cette nouvelle vision. C’est vrai qu’aujourd’hui, cette nouvelle dynamique n’est pas encore là et c’est après avoir produit que le producteur se demande où aller vendre. Et c’est en ce moment qu’il se rend compte que le marché n’est pas là. Donc c’est important aujourd’hui que nous puissions tenir compte de ce système de conseil agricole basé sur le marché pour aussi permettre à nos producteurs d’être plus compétitif sur le marché aussi national qu’international.

Quel peut être le principal handicap à ce Forum ? Des divisions entre acteurs? Des querelles ? Et quelle sera la stratégie du Forum pour une meilleure fédération des énergies ?

Vous avez raison. Mais je crois que les conflits d’intérêt ne sont pas propres aux acteurs du conseil agricole et rural. Là où il y a plusieurs acteurs pour les mêmes activités, il y a toujours des conflits. Pour vous répondre, à mon avis, le FNCR est une solution à ces problèmes. Avant, parce qu’on n’est pas ensemble, on ne sait pas réellement pourquoi on devrait travailler en synergie avec tel ou tel. Donc aujourd’hui, avec le Forum qui est là, c’est pour fédérer les énergies de tous les acteurs de ce maillon de notre agriculture. Ce n’est pas un défi gagné d’avance mais je pense qu’avec le bon sens de tous les acteurs, et la transparence qui va être mise dans la gestion des activités de ce Forum, tout le monde va s’y retrouver et en principe, on doit pouvoir s’entendre et travailler ensemble pour le développement de notre agriculture.

Comment le Forum entend-il travailler avec les institutions étatiques ?

C’est vrai que le Forum aura vraiment à se frotter avec les décideurs et gouvernants et je sais que sans l’appui des gouvernants représentés par les ministères, le Forum ne peut pas atteindre ses objectifs. Et toutes les préoccupations du Forum sont en fait les défis des politiques. Puisque le Forum a pour mission de fournir un conseil de qualité aux producteurs pour les rendre plus performants dans leurs activités. Et je crois que c’est aussi une préoccupation du Gouvernement. Donc cette vision du Forum est partagée par nos gouvernants. Le Forum doit aller vers les gouvernants et les gouvernants vont pouvoir soutenir et appuyer le Forum dans ses actions qui vont être à mon avis suivies aussi par les politiques. Le Forum va intervenir dans le pays et le pays est gouverné donc on ne peut pas aller contre les mesures qui sont en vigueur dans le pays. Le Forum va se conformer aux exigences des gouvernants pour mener à bien ses actions. Il n’y aura donc pas de conflit entre le forum et les ministères ou les politiques, mais plutôt une complémentarité.

Nous sommes dans la dynamique de « Vision Togo 2030 ». En tant que Directeur général de l’ICAT, quelle vision avez-vous pour l’agriculture togolaise d’ici 2030 ?

Ma vision d’ici 2030 pour notre agriculture, c’est premièrement que notre agriculture continue par être un gage de la sécurité alimentaire comme elle l’est déjà sur plusieurs plans sur des spéculations comme le maïs, les tubercules etc.. et qu’elle le soit également pour d’autres spéculations comme au niveau du riz ou autres productions animales. A ce jour, on est autour de 20 % de couverture de nos besoins en riz mais je crois que d’ici 2030, avec les grands travaux d’aménagement qui existent et qui viendront, le Togo pourrait réduire sa dépendance de plus de la moitié et couvrir jusqu’à 60 ou 70 % de nos besoins en riz pour qu’on ne soit plus trop dépendant de l’extérieur. Pour ce qui concerne les productions pour lesquelles nous sommes suffisants, je crois qu’avec la maîtrise de l’eau que nous appelons de nos vœux, et une forte mécanisation qui est en cours également avec les efforts du Gouvernement, le Togo pourra encore rendre notre maïs plus compétitif pour assurer un revenu plus substantiel à nos producteurs.

Que faites vous concrètement pour la diffusion des technologies à l’endroit des producteurs à la base ?

La diffusion des technologies à l’endroit des producteurs à la base, je crois que nous le faisons à travers le dispositif de l’ICAT qui a certes des difficultés, il faut l’avouer; mais nos agents qui sont engagés sur le terrain font un travail remarquable et nous avons aujourd’hui des outils de qualité de par leur approche participative qui respecte la personnalité des producteurs. Ces approches font que les technologies sont appropriées par les producteurs. Mais il faut avouer qu’aujourd’hui, il y a toujours des contraintes et défis à relever. Et nous espérons qu’avec ce forum, on pourra trouver des solutions à ces défis.

Un dernier mot ?

Je suis particulièrement très heureux pour ce jour tant souhaité qui est celui de l’Assemblée Générale Constitutive du FNCR au Togo. Pour moi, c’est l’aboutissement d’un long processus parce que nous avions cette idée depuis des années ; une idée qui se concrétise aujourd’hui où nous nous retrouvons en concertation avec nos collègues qui sont d’autres acteurs du conseil agricole et rural au Togo avec qui nous entretenions déjà de bonnes relations. Je crois qu’aujourd’hui, nos relations seront beaucoup plus fortes surtout dans le cadre professionnel pour assurer ensemble la vision qui est la nôtre, c’est-à-dire fournir un conseil agricole et rural de qualité aux producteurs pour les rendre plus performants.

 

Propos recueillis par David SOKLOU

 

 

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