Les deux grandes pluies de début avril marquent le démarrage de la saison agricole au sud-Togo. Dans les plantations, les paysans s’activent du matin au soir.
Située à 4 Km au sud –est de Vogan, chef –lieu de la préfecture de Vo, Wogba est une grande localité agricole. Dans ce milieu d’environ 4000 âmes, la vie est rythmée par les activités champêtres. On y cultive le maïs, le manioc et le haricot. Quelques infrastructures socio collectives (écoles, marché, électricité…) installées au centre du village offrent aux habitants les services sociaux de base. Ces infrastructures desservent également les nombreux fermes et hameaux environnants, peuplés de gens venus d’autres contrées, en quête de terres cultivables.
Monsieur Sézouhlon habite l’un de ces hameaux, situé sur la route Wogba-Badougbé. La soixantaine, l’homme travaille la terre pour nourrir sa femme et ses cinq enfants.
Nous prenons rendez-vous avec le paysan.
Pour Monsieur Sézouhlon, la journée commence aux premiers rayons du soleil. Vers sept heures, nous retrouvons l’homme dans son champ, entouré de sa femme et ses enfants qui n’ont pu aller à l’école à cause du corona virus. Une aubaine pour Sézouhlon car en milieu agricole, les enfants représentent une grande force de travail.
Quelques mètres carrés, constituent la plantation de Sézouhlon qui est essentiellement une exploitation familiale. Au programme de la journée, les semailles et la mise en terre de tiges de manioc.
A Wogba, et plus généralement au sud-Togo, les semis se font par poquets. La technique consiste à faire de petits trous au moyen d’un bois au bout pointu appelé «Tototsi » en langue watchi. Les graines sont ensuite enfouies dans ces trous.
Sur la terre rouge labourée quelques jours plus tôt, Sézouhlon fait des poquets en ligne, suivi par sa femme et ses enfants qui mettent en terre les graines de maïs.
La variété de maïs choisie par Sézouhlon achève son développement en deux mois. « Avant, on n’aimait pas cette variété. On préférait la variété de trois mois, que nous ont léguée nos ancêtres et qui, selon nous, contient plus d’éléments nutritifs. Mais progressivement, cette variété fait place à celle que nous utilisons aujourd’hui car sa croissance est plus rapide. Car de nos jours, avec les caprices du ciel, on ne sait quand les pluies vont commencer ni quand elles vont s’arrêter », explique le paysan.
Les caprices du ciel, c’est ainsi qu’en milieu paysan watchi on désigne les effets du changement climatique, sans trop savoir les origines de ce phénomène souvent imputé à la colère des dieux.
A mesure que le jour avance, le soleil se fait de plus en plus impitoyable frappant de ses rayons de feux les corps meurtris des travailleurs.
A la mi-journée, les semailles sont terminées. Les enfants retournent à la maison après avoir déjeuné avec leurs parents.
A quatorze heures, Sésouhlon et sa femme reprennent le travail. Cette fois, il s’agit de mettre en terre des tiges de manioc sur des buttes érigées en rangées sur le sol.
Au moyen de son coupe-coupe, Sézouhlon découpe de longues tiges de manioc en morceaux plus ou moins égaux, qu’il place ensuite dans le sol en position oblique. « Placée obliquement, la tige pourra vite prendre racine et se développer convenablement. C’est ainsi que nous l’avons appris de nos ancêtres. Mes enfants sont trop jeunes pour ce travail. C’est pourquoi je leur ai demandé de rentrer à la maison. Quand ils seront plus grands, je leur enseignerai la technique », confie Sézouhlon.
Vers seize heures, la moitié du champ est recouvert de tiges de manioc. Le paysan reprend le chemin de la maison. Il reprendra le travail le lendemain très tôt.
Dans la vaste plaine abritant le champ de Sézouhlon, les oiseaux saluent le retour des paysans au bercail.
Dans quelques jours, les champs se pareront de verdure, symbole d’une bonne récolte.